« Au-delà de la rentabilité financière, il y aussi aussi la rentabilité écologique. »
Rencontre avec Stéphane Tomczak, fondateur de DELIVER, l’événement phare en Europe sur la logistique et le e-commerce.
G.R.N. : Comment les retailers gèrent-ils le dernier kilomètre face aux pics d’e-commerce ?
Stephane Tomczak : Les e-commerçants gèrent et évaluent les flux avec l’analyse de données de plus en prédictive. L’utilisation de l’IA dans ce processus joue un rôle clé en permettant aux retailers d’anticiper de façon beaucoup plus précise. Cela ne se traite pas spécifiquement sur le dernier kilomètre, même s’il est clair que c’est un vrai défi de rentabilité et d’efficacité notamment face aux pics d’e-commerce tels que le Black Friday et Noël. Pour gérer de façon effective le dernier kilomètre sur ces périodes phares, il est capital pour les e-commerçants de pouvoir communiquer sur une date de garantie de livraison avant Noël, presque chaque commande étant à ce moment-là un cadeau de Noël et donc attachée à une date de livraison impérative. Plus on se rapproche du jour de la livraison, plus les retailers se focalisent sur l’express et les options de livraison en same day (coursiers et click & collect magasin pour les acteurs multicanaux). C’est également à ce stade que les points relais ont une réelle importance et deviennent des alliés de poids dans cette gestion. Le 25 décembre 2020 tombant un vendredi, le calendrier cette année est opérationnellement avantageux, les commandes pouvant être traitées jusqu’au dernier moment sans jour perdu. S’appuyer sur les points relais permet de s’assurer que les colis ne retournent pas à l’entrepôt et qu’ils seront retirés par les clients à la date convenue. Cela demande beaucoup d’agilité et d’anticipation de la part des e-commerçants mais également de leurs partenaires de livraison.
G.R.N. : Quels sont les initiatives et modèles rentables en matière de livraison ? Et de dernier kilomètre ?
S.T. : Par exemple, Paack a misé sur un modèle prônant la livraison programmée et propose des livraisons same-day au prix d’un colis envoyé par les services postaux. Ils ont créé une technologie interne afin de pouvoir allier une offre de services qualitative à des tarifs compétitifs sur le marché Européen. Pour plus de rentabilité, l’utilisation de la technologie joue un rôle capital : elle permet d’affiner son offre et de l’adapter à tous les secteurs et tous les pays pour pouvoir être précis dans l’offre et se déployer partout. Au-delà de la rentabilité financière, il y aussi l’aspect de la “rentabilité” écologique qui joue un rôle de plus en plus important, fort heureusement. Si on prend l’exemple de DPD Group, ils sont extrêmement investis dans le développement durable et mettent en place des outils et des initiatives qui les incitent à innover pour atteindre leur objectif de réduire de 30% leurs émissions de CO2 de chacun de leurs colis d’ici 2025. Sachant que toutes leurs émissions existantes sont compensées depuis des années pour toutes leurs livraisons et non pas une partie liée à un premium tarifaire. Gageons que tous les acteurs de la livraison suivront rapidement cet exemple méritant.
G.R.N. : Des nouveaux partenariats pour les livraisons collaboratives ?
S.T. : Récemment en France, Yper et Système U ont annoncé leur partenariat et Shopop progresse en Europe depuis le début de l’année via des partenariats avec plus de 650 magasins. La livraison collaborative est un vrai challenge pour convertir des particuliers en livreurs et les engager dans ce processus, tout en maintenant une rentabilité qui impose d’atteindre un certain volume de livraisons pour s’aligner aux coûts d’une livraison classique.
G.R.N. : Quelle évolution pour la livraison à domicile vs. le click & collect ?
S.T. : Avec la crise sanitaire cette année, les achats en ligne ont connu une très forte hausse notamment dans des secteurs comme l’alimentaire. Il y a aussi eu une prise de conscience des consommateurs sur leur façon de consommer et on note une volonté de soutenir de plus en plus les commerces de proximité. La volonté de changement des habitudes a également incité les e-clients à s’interroger sur l’impact environnemental de leurs achats en ligne. Pour les retailers ayant un emplacement physique, ces éléments combinés ont conduit à une augmentation notable du click & collect ces derniers mois et cette option de livraison pourrait prochainement représenter la moitié du chiffre d’affaires des ventes en ligne de nombreux d’entre eux. Cette croissance reste cependant à nuancer car on sait que ce mode de livraison séduit majoritairement les consommateurs de plus de 45 ans et que la livraison à domicile reste encore le moyen privilégié par les acheteurs.
Diffusé dans la newsletter Digital Retail News du 1er décembre 2020